Cantate de guerre

J’ai sept ans. J’ai mille ans. Le sol bleu gémit. Le ciel respire par le trou des étoiles. Je me suis enfui. Je marche depuis des siècles. Je voudrais posséder les paupières de ma mère et fermer le monde.

Date de parution: septembre 2011
Éditeur: Lansman

Description:

Un père apprend la haine à son fils pour en faire un soldat. Mais le mot soldat a-t-il encore son sens ici ? Jusqu’où le père peut-il aller dans sa quête insensée de puissance ? Le fils peut-il encore le regarder avec amour ? Sans nommer une guerre, une idéologie, un Dieu, un parti… sans montrer du doigt un uniforme en particulier, Cantate de guerre dénonce l’engrenage de la haine raciale.


Les prix:

  • Prix SACD de la Dramaturgie Francophone, 2012
  • Prix Michel-Tremblay, 2012

Traductions en langues étrangères:

  • Traduit en anglais par Keith Turnbull sous le titre de War Cantata [2012]
  • Traduit en allemand par Heinz Schwarzinger sous le titre de Kriegskantate[2011]
  • Traduit en espagnol par Bryceidee Garcia sous le titre de Cantata de guerra

Création du spectacle:

Cantate de guerre a été créé en septembre 2011 à Montréal, au Théâtre d’Aujourd’hui, dans une mise en scène de Martine Beaulne. Avec Paul Ahmarani, Mikhaïl Ahooja, Abdelghafour Elaaziz, Frédéric Lavallée, Mathieu Lepage, Philippe Racine, Denis Roy.

Assistance à la mise en scène : Stéphanie Capistran-Lalonde. Dramaturgie : Marie-Christine Lesage. Scénographie : Anick La Bissonnière. Costumes : Daniel Fortin. Éclairages : Claude Cournoyer. Conception sonore : Ludovic Bonnier. Accessoires : Julie Measroch. Maquillages : François Cyr. Direction de production : Annie Lalande. Direction technique : Jean-Philippe Charbonneau. Une création du Théâtre d’Aujourd’hui.

En photos:

photos: Valérie Remise

Entretien avec Larry Tremblay:

Mot de l’auteur:

« Nous est un autre.»

La guerre consiste à se débarrasser de l’autre. Et l’autre consiste à ne pas être moi. Surtout pas moi. Et pourtant… nous sommes tous l’autre pour un autre qui n’est pas nous. La guerre : cercle fait d’aveuglement qui se resserre sur lui-même jusqu’à l’étouffement. Pourquoi la faisons-nous? Pour de la terre, du pétrole, une idée. Pour rien, finalement, quand ceux qui s’entretuent, vidés et déshumanisés, ont oublié la raison de leur acharnement. La guerre, quand elle se fait ailleurs devient un spectacle pour ceux qui ne la font pas. Pour ceux qui s’enfoncent dans un sentiment d’impuissance ou s’étourdissent dans un sentiment d’indifférence. Mais il y a ceux et celles qui en témoignent au risque de leur vie. C’est la lecture du livre d’Anna Politkovskaïa – Tchétchénie, le déshonneur russe – qui m’a amené à écrire Cantate de guerre et à m’interroger sur les rapports entre la guerre et le théâtre. Un livre dur, cru, qui évite manichéisme et leçon de morale à bon marché.

Comment le théâtre peut-il témoigner des guerres ethniques dont les motivations se perdent dans le bruit de la globalisation? Comme un journaliste de guerre? En étant sur le terrain? En montrant? En analysant les raisons du conflit? En témoignant de l’absurdité de la haine? La scène est le terrain du théâtre. C’est un lieu chaud où la parole mise sur le pouvoir rythmique des mots pour donner aux personnages leur poids de sang et de chair. Sans nommer une guerre, une idéologie, un Dieu, un parti, sans montrer du doigt un uniforme en particulier, Cantate de guerre dénonce l’engrenage de la haine raciale. La frontière entre le monde réglementé du soldat et celui du tortionnaire, du mercenaire, de l’intégriste ou du génocidaire tend à s’effacer dans le contexte actuel où le partage des richesses est de plus en plus inégal. Cantate de guerre porte sur la cruauté de la guerre et sur la transmission de la violence. Un père apprend la haine à son fils pour en faire un soldat. Mais le mot soldat a-t-il encore son sens ici? Le désir d’éliminer l’autre jusqu’à la détresse, jusqu’à l’épuisement, nous oblige à remettre en question le sens réel de l’humanité. De quoi est fait l’homme? Jusqu’où peut-il aller dans sa quête insensée de puissance? Le fils peut-il encore regarder le père avec amour?

-Larry Tremblay

Mot de la metteure en scène:

« Arrache, salaud, l’empreinte de ta main sur ma tête d’enfant. »

Cantate de guerre fut, pour moi, dès sa première version un véritable coup de cœur, car la langue poétique et rythmique de Larry Tremblay proposait déjà une musicalité originale pour incarner la violence inhérente à un contexte de guerre. La version actuelle présente une pièce forte et pertinente par son propos tragique, unique par sa langue concise et ciselée, fascinante par son aspect choral, percutante par son actualité.

Larry Tremblay met habilement en scène la culture d’une haine atavique. Un soldat, brisé par une fatigue morale et physique, vit un effondrement. Une nuit de prise et de crise de conscience initiée par la mémoire de son fils qui surgit en présence du fils de l’ennemi. Véritable jeu de miroir qui interroge les fondements de la transmission.

C’est aussi une pièce sur la banalisation du mal, la déshumanisation de l’homme dans notre monde actuel. Ce que l’homme fait à l’homme… Nous recevons les mots de la colère, les sonorités de l’intolérance nichées, depuis des siècles, au tréfonds de la rage. Un lieu où la vie disparaît pendant que l’homme est vivant ou mort-vivant. Nous sommes témoins de l’insoutenable légèreté de la cruauté en temps de guerre, des abus intimes et politiques, du viol des femmes et, par conséquent, de la volonté d’extermination d’une race.

Comme peuple, même éloigné de ces terres minées, a-t-on une responsabilité face à ces atrocités? Le temps est à la réflexion…

-Martine Beaulne

Autres productions:

Cantate de Guerre; les Francophonies en Limousin

Production: Compagnie Nsala, 2014
Coproduction: Festival des Francophonies en Limousin
Mise en scène: Harvey Massamba

Production radiophonique:

Réalisation : Juliette Heymann

Larry Tremblay a reçu pour ce texte le Prix SACD 2012 de la Dramaturgie Francophone, avec France Culture. Prix remis au Festival des Francophonies de Limoges, en Octobre 2012.

Le Festival des Francophonies est la seule manifestation en France consacrée au spectacle vivant francophone. Depuis douze ans, la SACD s’associe à ce Festival afin de soutenir la diversité et la vitalité des écritures francophones venues du monde entier. En 2012 pour la première fois France Culture est partenaire du Prix SACD de la Dramaturgie Francophone.

A l’occasion des 24h00 de la francophonie « Le français est une chance » durant toute la journée du mercredi 20 Mars, sur France Culture, la fiction s’associe donc à cette nouvelle opération « 24h00 » en diffusant « Cantate de guerre » de Larry Tremblay.

Cantate de guerre « Un père apprend la haine à son fils pour en faire un soldat. Mais le mot soldat a-t-il encore son sens ici? Le désir d’éliminer l’autre jusqu’à la détresse, jusqu’à l’épuisement, nous oblige à questionner le sens réel de l’humanité. De quoi est fait l’homme? Jusqu’où peut-il aller dans sa quête insensée de puissance? Le fils peut-il encore regarder le père avec amour? »

Avec

Thierry Hancisse de la Comédie Française (Le Père)

India Hair (Le Fils)

Arnaud Churin, Luc-Antoine Diquero, Loïc Houdré, Mohamed Rouabhi, Roland Timsit (Le Chœur des soldats)

Et la voix de Christine Culerier

Montage et assistance technique Matthieu Le Roux

Prise de son et mixage Bernard Lagnel

Assistante à la réalisation Laure-Hélène Planchet

Quelques liens:

La critique:

« Larry Tremblay remporte l’un des paris qu’il s’était lancés en écrivant Cantate de guerre : faire sentir l’intolérance et la violence à travers les mots seulement. Sous la direction habile de Martine Beaulne, ils font naître des images enfouies en nous et frappent de plein fouet. Dans la bouche de Paul Ahmarani, stupéfiant d’humanité dans ce rôle odieux, ils sonnent parfois carrément comme des coups de poing… »

-Alexandre Vigneault, La Presse

« C’est une oeuvre puissante, hypnotisante, douloureuse. »

-Karyne Lefebvre, Bouillant de culture

« Paul Ahmarani est vraiment extraordinaire.»

-Elsa Pépin, Voir

« C’est extrêmement intéressant … c’est rugueux, c’est brutal, ça arrive comme une enfilade de coups de mitraillette. … Très belle mise en scène de Martine Beaulne. Mikhaïl Ahooja est une véritable découverte. »

-Annie-Soleil Proteau, C’est bien meilleur le matin

« Avec Cantate de guerre, Larry Tremblay accouche d’un très grand texte théâtral qui parle de la mécanique de la haine : dur, viscéral, et sans compromis. … À la composition incroyablement habitée de Paul Ahmarani, s’ajoute un impeccable travail généreux et fraternel des comédiens formant le chœur. »

-Yves Rousseau, LeQuatrième.com

Voir plus de critiques

« Avec un vocabulaire qui ne craint pas la laideur et la vulgarité, Larry Tremblay sait faire naître cet état d’urgence sans se complaire dans le pathos. Son écriture sait creuser dans la douleur tout en apportant une réflexion pertinente. Dans son heureuse fusion entre l’émotion et la pensée, elle retrace les contours entre l’engagement et la poésie. … Entièrement masculine, la distribution se révèle d’une grande intensité. La figure paternelle interprétée par Paul Ahmarani surprend par son jeu nuancé alors que le fils donne à Mikhaïl Ahooja de beaux instants de dilemme intérieur. Le quintette porte avec force tout le poids de la sauvagerie et la dureté d’une civilisation estropiée. »

-Olivier Dumas, Montheatre.qc.ca

« Ahmarani joue un excellent professeur de guerre pris à son propre piège, déchiré entre la cruauté et la douleur, étranglant son humanité jusqu’à ce qu’elle le submerge.»

-Elsa Pépin, Voir